Droits de douane de Trump : peu d'écho auprès des électeurs américains
Un nouveau sondage Léger montre que peu d'Américains considèrent les droits de douane comme une question de sécurité nationale, et qu'une majorité souhaite limiter les pouvoirs du président.
Un sondage Léger exclusif réalisé pour Qc125/338Canada et Maintenant Média révèle que de nombreux Américains considèrent toujours l'inflation comme le principal problème auquel leur pays est confronté aujourd'hui, et que la plupart d'entre eux ne croient pas à l'argument de la sécurité nationale pour justifier les droits de douane imposés à de nombreux alliés économiques des États-Unis.
Alors que Donald Trump place une fois de plus les droits de douane au centre de sa stratégie économique, un nouveau sondage américain réalisé par Léger pour 338Canada / Maintenant Média suggère que cette question pourrait avoir un impact limité sur les électeurs et que les arguments avancés par Trump pour justifier ces droits de douane sont accueillis avec un scepticisme considérable.
Lorsqu'on leur a demandé de citer le problème le plus important auquel le pays est confronté, 28 % des personnes interrogées ont répondu « l'inflation », de loin la réponse la plus fréquente. Viennent ensuite la pauvreté (8 %), les soins de santé (7 %) et l'immigration (7 %). Des préoccupations telles que l'accessibilité au logement, la dette publique et le changement climatique figurent plus bas dans cette liste.
Absents de la liste ? Les guerres commerciales et les déficits commerciaux.
Et la crise des opioïdes/fentanyl ? Elle ne préoccupe que 1 % des personnes interrogées. Il s'agit sans aucun doute d'un enjeu de santé publique important, mais il ne suscite pas autant l'attention politique comme semblent le penser de nombreux membres de l'équipe de Trump.
Qui devrait décider des droits de douane ?
Selon les lois américaines, le président des États-Unis ne peut imposer des droits de douane sans l'accord du Congrès que dans certaines situations, notamment pour des raisons de sécurité nationale.
Et pourtant, tout le discours commercial et économique de Trump semble axé sur l'imposition de nouveaux droits de douane, y compris sur les produits canadiens, malgré que les deux pays soient signataires de l'ACEUM (qui porte la signature de Trump lui-même).
Le sondage Léger montre que les Américains ne sont pas enthousiastes à l'idée de donner au président un pouvoir unilatéral en la matière. À la question : « En vertu des lois américaines, le président ne peut imposer des droits de douane sans l'accord du Congrès que dans certaines situations, notamment pour des raisons de sécurité nationale. Selon vous, qui devrait avoir le pouvoir d'imposer des droits de douane sur les produits étrangers ? », seuls 20 % des personnes interrogées ont répondu « le président ».
Une proportion légèrement plus importante (25 %) s'est prononcée en faveur de l'attribution de ce pouvoir au Congrès, tandis qu'une pluralité (40 %) a préféré un partage des pouvoirs entre les deux branches du gouvernement.
La préférence pour une prise de décision partagée était constante dans la plupart des groupes démographiques. Une pluralité dans toutes les tranches d'âge était favorable à un partage des pouvoirs, y compris la moitié des électeurs âgés de 18 à 34 ans, le pourcentage le plus élevé de tous les groupes.
Le soutien au contrôle présidentiel unilatéral était le plus élevé parmi les électeurs républicains (37 %) et les Américains âgés (26 % parmi les plus de 55 ans), mais même au sein de ces groupes, il restait minoritaire. Il est à noter que les femmes étaient nettement moins nombreuses que les hommes à soutenir l'attribution de l'autorité exclusive au président (15 % contre 26 %).
En bref, peu d'Américains souhaitent que la Maison Blanche prenne seule les décisions. Ces chiffres suggèrent un manque de confiance dans le pouvoir discrétionnaire de l'exécutif, peut-être influencé par l'escalade chaotique des droits de douane au cours des derniers mois.
Sécurité nationale ? Les électeurs n'y croient pas
Comme mentionné ci-dessus, en vertu de la législation américaine, le président ne peut imposer des droits de douane unilatéralement que dans des circonstances limitées, notamment pour des raisons de sécurité nationale. Trump s'est appuyé à plusieurs reprises sur cet argument, en particulier lorsqu'il visait la Chine, le Mexique et l'Union européenne.
Mais le sondage Léger révèle que seuls 26 % des électeurs pensent que les droits de douane visent principalement à répondre à des préoccupations de sécurité nationale.
Une majorité (51 %) rejette catégoriquement cette affirmation, tandis que 23 % se disent incertains.
Ces résultats sont cohérents dans toutes les tranches d'âge, la majorité de chaque groupe démographique rejetant cette justification. Même parmi les républicains, seuls 44 % pensent que les droits de douane imposés par Trump sont liés à la sécurité nationale, ce qui représente une pluralité, mais pas une majorité écrasante. L'argument principal de Trump repose donc sur des bases fragiles, la plupart des Américains n'étant pas convaincus ou ne comprenant pas clairement l'objectif de ces mesures commerciales.
Opinions divergentes sur les droits de douane par pays
Interrogés spécifiquement sur les droits de douane imposés aux principaux partenaires commerciaux, les opinions du public étaient partagées, mais là encore, l'opposition tendait à l'emporter sur le soutien.
Le cas le plus controversé est celui du Canada, où 48 % des personnes interrogées se sont opposées aux droits de douane, contre 37 % qui les ont soutenus. Les droits de douane sur le Mexique et l'Union européenne étaient également plus impopulaires que populaires.
Seule la Chine a échappé à cette tendance : 47 % des personnes interrogées ont soutenu les nouveaux droits de douane, contre 39 % qui s'y sont opposées. Cela suggère que si les Américains peuvent soutenir le protectionnisme envers leurs rivaux stratégiques, ils sont moins disposés à punir leurs alliés traditionnels.
Un message sur des bases fragiles
Dans l'ensemble, les résultats de ce sondage Léger suggèrent que les droits de douane restent un message politiquement fragile pour Donald Trump. La plupart des Américains ne considèrent pas les guerres commerciales ou les déficits commerciaux comme une préoccupation majeure. La plupart ne croient pas que les droits de douane soient nécessaires pour la sécurité nationale. La plupart ne veulent pas que le président agisse seul.
Cela ne signifie pas que la question disparaîtra, mais cela suggère que le programme commercial agressif de Trump pourrait mieux fonctionner pendant la campagne électorale qu'auprès de l'électorat dans son ensemble.